mercredi 22 avril 2015

Cosmos (2)

Je sais, j’ai dévié, dérivé, contourné, digressé pour aboutir au Land Art, vraiment pas la peine de tenter de philosopher pour découvrir ainsi une Nature détournée … alors qu’elle est si belle à l’état naturel, toute empreinte d’une force de vie formidable, qu’exprime la glycine en ce moment de l’année, quand elle éclate de fleurs. Quand elle sourd de toute part de prochaines feuilles encore fragiles. Elle s’alourdit, et tire un max sur les tendeurs métalliques qui la font tenir horizontale en faux ciel fleuri, cachant le vrai ciel rempli d’étoiles (je m’exerce… !)

Je m’exerce aussi à l’art des anciens (plongés dans un temps virgilien, celui que l’on retrouve ici fait de marchés du jeudi qui proposent le jambon d’autrefois, produit par des cochons gras, ayant atteint l’âge de la maturité, quasiment morts de mort naturelle, et qui finissent en sandwiches sublimes sur du pain d’avant, fourré de graines craquantes) (je m’exerce…)

Je m’exerce à l’art des anciens donc, « de leur rester fidèle en incarnant leurs vertus, en épousant leur art de produire de la douceur » (page 26, je suis revenu au début).

une nuit en Italie avec la pleine lune au bord de la mer,
super pour philosopher

Transformer une catastrophe en fidélité, voilà ce que propose Cosmos, sous-titré « une ontologie matérialiste ». « Il prend la forme d’un pentagramme composé de pentagrammes (ce n’est pas de moi mais de Onfray himself) : cinq parties composées de cinq chapitres. Une interrogation sur le temps (qui passe), le temps virgilien qui fut celui de nos pères, temps calme et paisible qu’il s’agit de retrouver pour l’habiter en toute sérénité (on exclut les épisodes de guerres atroces naturellement).

« Puis la force de la force, une réflexion sur la vie comme force par-delà le bien et le mal à laquelle nous sommes soumis jusqu’à la mort qui en constitue une variation ».

Dans la troisième partie, « un alter ego dissemblable », Onfray envisage cette thèse de Darwin : « il n’y a pas de différence de nature entre l’homme et l’animal, mais une différence de degré ». Il me convainc de refuser la corrida, que je croyais la persistance de la victoire de l’homme (bon) sur l’animal image du mal (tant mieux s’il souffre pour la rémission de nos péchés à nous) (1). Il me met un peu mal à l’aise de tant aimer le jambon (gras) de vieux porc, comme si d’un coup je me révélais cannibale ! Mais puisque les plantes pensent comme nous, même si ce n’est pas à la même vitesse, pourquoi devenir végétalien si c’est pour faire souffrir la chlorophylle aussi ? Il va devenir difficile de se restaurer tout en réfléchissant aux agressions persistantes que l’on inflige à Dame Nature !

« Dans la quatrième partie, une éthique de l’univers chiffonné, une méditation sur le Cosmos comme lieu généalogique immanent et païen de la sagesse qui permet la coïncidence de soi avec soi, donc avec les autres ». Attali m’avait appris à devenir : moi, voilà qu’il faut que je me coïncide, forcément cela précède mon acceptation de l’autre ! (2)

Enfin dans la cinquième partie, « l’expérience de la vastitude », Onfray propose « une invitation au sublime » (je vous ai pour cette raison intercalé quelques images de Land Art) « résultant de la tension entre le souci et l’attention au spectacle du monde concret et la petitesse de notre conscience aiguisée, sachant qu’elle n’est pas grand-chose, mais qu’elle peut beaucoup ».


A un moment, Onfray déballe ce qu’il pense de la religion chrétienne, reprenant les thèses de Prosper Alfaric suivant lesquelles le Christ serait une pure invention humaine, alors que tout ce qui se rapporte à cette légende nous convainc qu’il s’agit de l’illustration d’une religion solaire, tous les évènements marquants de la vie de Jésus coïncidant avec des moments remarquables du temps, les solstices ; des saisons ; le recommencement de la vie ; la naissance et la mort… Il m’arrive comme aux enfants quand ils découvrent que le Père Noël est une fable, et qu’ils se découvrent athées sans l’avoir désiré :

comme quoi manquer de repères rend difficile la pratique de la philosophie !



























Pire, Dieu n’existerait donc pas, pas davantage qu’un quelconque Créateur de l’Univers. 

Même mes ocelles de papillons ne seraient pas un signe de « quelque chose d’initial », Adolf Portman a dit dans « les Formes animales » qu’il s’agirait tout bêtement « de formes certes intéressantes de vitalisme matérialiste ou de matérialisme vitaliste… ». Je ne me sens pas convaincu par ce verbiage ... philosophique !


Je réfléchis à ce titre superbe  : "après-demain demain sera hier" : de quoi méditer sur l’impermanence du temps qui passe… et la vanité de s’agiter dans un monde où notre marge de manœuvre parait bien minuscule…


Ah que philosopher est une douce chose …

je médite en croquant (grâce à ma dentition rénovée)

dans ma tranche de pain craquante (grâce aux multi-céréales)

enduite de beurre tendre et de jambon grassouillet virgilien (le bon cholestérol)




La vie peut-être douce… quand on a la sagesse de la prendre

comme elle vient


(il faut quand-même intervenir pas mal
si l'on veut éviter trop d'emmerdes…)