mardi 28 octobre 2014

Sivens dans le Tarn

Les experts ont parlé

Ouf on peut, dans ce pays, faire confiance aux experts ! S’agissant d’irrigation des terres agricoles, il y a des décennies cependant que la messe est dite : le maïs consomme beaucoup d’eau. L’eau est rare, si on la prélève dans les rivières, puisqu’on portera atteinte aux autres usages de l’eau, notamment piscicole. Donc il faut faire attention. Le maïs laisse les sols dénudés l’hiver, ce qui favorise l’érosion. Pas très bon l’érosion, qui favorise le transport dans la rivière de matières indésirables. La culture du maïs suppose des engrais. Pas très bon s’ils fichent le camp dans la rivière, si celle-ci sert à la fourniture d’eau potable. Pire, si des molécules phytosanitaires (nos bons vieux pesticides) sont épandus en excès (or en mettre trop permet d’en mettre assez, pensaient les anciens céréaliers), le risque étant de voir toujours la même chose : les pesticides enrichir les eaux de surface.


Vous me direz : certes ! Les études sur le maïs génétiquement modifié avaient justement pour but de trouver des maïs OGM résistant à la sécheresse ; à la pyrale ; tout cela  pour créer le maïs du futur moins exigeant en eau et en pesticides ? Mais comme il est interdit d’y penser, (je crains que José Bové ait manqué d’esprit de clairvoyance dans cette vieille affaire où notre Pays brille par son Principe de précaution), on cultive le bon vieux maïs, ce qui explique (sans le justifier) le projet de Sivens.


Sivens dans le Tarn, pas loin de Gaillac, (son vin perlé) et du merveilleux Puycelsi. Sivens où un jeune vient de mourir pour défendre une alternative à un projet tel qu’on le pratiquait dans les années 90. Pas dans les années 2015, 25 ans plus tard !

Voilà deux Conseils Généraux qui se lancent dans l’agriculture traditionnelle, surestimant les besoins en eau, et lançant un gros projet conçu selon des critères dépassés. Autrefois, on faisait appel à l’ingénierie du Génie Rural, des Eaux et des Forêts. Je me souviens très bien avoir stoppé ce genre de projets en Haute-Garonne dès les années 1994, de même qu’on ne parle plus de remembrement agricole depuis des lustres en France.


Alors arrivent mes collègues du Conseil Général qui se nomme désormais, depuis la réforme, Conseil Général de l’Environnement et du développement durable. Les auteurs portent le titre (superbe) d’Ingénieurs Généraux des Ponts et des Eaux et Forêts. Ils sont Ingénieurs agronomes ou Polytechniciens, ont fait les écoles des Ponts ou des Eaux et Forêts, leur sigle est IPEF. J’en suis membre honoraire !

Au Conseil Général, ils expertisent les projets d’aménagement partout dans le monde, et appuyés sur leur charte de qualité et d’indépendance, peuvent se permettre de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Comme c’est bon ce langage des faits, et de lire leur rapport, publié par la Préfecture du Tarn permet de connaitre la situation telle qu’elle est.

On y apprend que le barrage prévu est surdimensionné ; donc les opposants ont tort quand ils sont excessifs, et attaquent les forces de l’ordre pour contester un projet juridiquement correct. Mais ils n’ont pas si tort que cela, en disant que le projet technique est perfectible. Que l’issue finale consiste à revoir (à la modestie) le projet initial.


J’ai trop connu de projets surdimensionnés. Aboutissant à un prix de revient à l’hectare insupportable. Conduisant les bénéficiaires satisfaits aujourd’hui d’avoir trop d’eau pour en avoir assez. Rouspétant quand le cours du maïs trop bas nuisait à la rentabilité de leur exploitation. Demandant aux mêmes Conseillers généraux de financer, des années plus tard,  les annuités d’emprunt. Même si le maïs fait l’objet, au titre de la politique agricole commune, d’aides à la surface…irriguée.


Le beurre et l’argent du beurre

il faut raison garder

si les experts pouvaient expertiser…


…avant ?


le 251, rue de Vaugirard, entre Vaugirard et Volontaires